dimanche, avril 28, 2024
Société

France : feu vert pour les portables « mouchards »

FRANCE : FEU VERT DE L’ASSEMBLÉE NATIONALE POUR LES PORTABLES MOUCHARDS (80 VOIX POUR ET 24 VOIX CONTRE)

Les députés ont donné leur aval à une disposition controversée du projet de loi sur la justice d’Éric Dupond-Moretti, permettant l’activation à distance de téléphones portables pour écouter et filmer à l’insu des personnes visées dans certaines enquêtes.  Cette mesure a été soutenue par une majorité de l’Assemblée, avec 80 voix pour et 24 voix contre.

Éric Dupond-Moretti
Éric Dupond-Moretti

Les députés des partis présidentiel, Les Républicains et Rassemblement National ont voté en faveur de l’article, tandis que ceux de la Nupes (Nouvelle Union populaire écologique et sociale) ont voté contre, tout comme le président du groupe Liot, Bertrand Pancher.

Cet article prévoit l’activation à distance de téléphones portables, d’ordinateurs et d’autres objets connectés dans deux cas distincts.

Le premier cas concerne la géolocalisation permettant de suivre en temps réel les déplacements de personnes visées dans le cadre d’enquêtes sur des crimes ou délits punis d’au moins cinq ans d’emprisonnement.

Le Sénat avait proposé de limiter cette mesure aux crimes et délits passibles de dix ans d’emprisonnement, mais l’Assemblée a préféré conserver la version du gouvernement.

Le deuxième cas concerne la captation à distance de sons et d’images de personnes visées dans des affaires de terrorisme, de délinquance et de criminalité organisée. Le ministre de la Justice, Éric Dupond-Moretti, a insisté sur le fait que cette captation ne concernerait que « quelques dizaines d’affaires par an ».

La gauche s’oppose vivement à ces mesures, dénonçant une « intrusion dans la vie privée » et une « dérive autoritaire ».

La France Insoumise soulève également les critiques formulées par des avocats et des organisations non gouvernementales.

Un amendement proposé par la députée de la majorité présidentielle, Naïma Moutchou (Horizons), précise que la captation ne peut être mise en place que « lorsque la nature et la gravité des faits le justifient » et pour une durée strictement proportionnée à l’objectif.



Le camp présidentiel souligne les « garanties » apportées, indiquant que la captation serait réservée aux affaires les plus graves et nécessiterait une autorisation renouvelable par un juge des libertés et de la détention pour une durée maximale de six mois.

Éric Dupond-Moretti compare cette mesure à l’utilisation de micros ou de caméras placés chez des suspects.

Il fait également valoir que l’activation à distance d’appareils connectés est déjà utilisée par les services de renseignement sans l’autorisation d’un juge, tandis que cette mesure exige une autorisation judiciaire.

Dans le cadre de cet article, d’autres mesures sont prévues, telles que l’extension des perquisitions de nuit et la possibilité de recourir à une télé-consultation médicale lors d’une prolongation de la garde à vue.

Certains députés de l’opposition ont tenté sans succès de supprimer la possibilité pour un juge, dans certaines conditions, de placer sous assignation à résidence avec surveillance électronique une personne qui a été libérée de détention provisoire en raison d’une erreur de procédure, qualifiant cette disposition de liberticide.

Actuellement, seul le placement sous contrôle judiciaire est possible dans de tels cas.

En bref, malgré les préoccupations de certaines voix de l’opposition et des critiques concernant une possible atteinte à la vie privée, les députés ont approuvé la disposition permettant l’activation à distance des téléphones portables dans le cadre d’enquêtes spécifiques.

Le gouvernement et ses soutiens mettent en avant les garanties encadrant l’utilisation de cette mesure, ainsi que la nécessité de s’adapter aux évolutions technologiques pour lutter contre le terrorisme et la criminalité organisée.

Le projet de loi sur la justice continue d’être débattu à l’Assemblée nationale, avec d’autres dispositions importantes concernant les perquisitions de nuit et les télé-consultations médicales lors des prolongations de la garde à vue.