dimanche, décembre 1, 2024
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L’UE inquiète d’un accord de pêche entre le Maroc et la Chine

L’Union européenne inquiète d’un accord de pêche entre le Maroc et la Chine

Au sein de l’Union européenne, plusieurs voix expriment des préoccupations face à la possibilité que le Maroc conclue un accord de pêche avec la Chine, susceptible de concurrencer les intérêts européens. Le magazine Jeune Afrique a récemment consacré un dossier à cette question, soulignant l’inquiétude croissante des responsables européens à ce sujet, rapporte le journal arabophone Assabah.

Le magazine français met en lumière une situation paradoxale pour l’Union européenne, qui semble avoir été prise à son propre piège après que la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a annulé, en octobre, les accords agricoles et de pêche conclus avec le Maroc. La décision, justifiée par l’absence de consentement présumé des populations sahraouies (qui ne sont pas officiellement représentées par des élus), a ouvert la voie à une opportunité stratégique pour la Chine. Cette dernière, disposant d’une flotte importante de navires de pêche opérant déjà dans les eaux marocaines, attendait depuis longtemps un moment favorable pour renforcer sa coopération avec Rabat.

Dans son article, l’auteur souligne l’ironie de la situation : alors même que des pays européens comme l’Espagne et la France ont récemment exprimé un soutien explicite à la marocanité du Sahara, la Cour de justice de l’Union européenne a choisi d’annuler un accord clé avec le Maroc, affectant directement les relations économiques dans le domaine de la pêche.

Réactions et tensions après la décision de la Cour de justice de l’Union européenne
La décision de la Cour a suscité des réactions vives tant au Maroc qu’en Europe, notamment en Espagne, le principal bénéficiaire de cet accord. Ce dernier, entré en vigueur en 2019, avait permis à 128 navires de l’Union européenne, principalement espagnols (90 navires), mais aussi allemands, français, irlandais, italiens, lituaniens, néerlandais, polonais et portugais, de pêcher dans les eaux marocaines.

Face à cette décision, Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, et Josep Borrell, Haut représentant de l’Union européenne, ont rappelé dans un communiqué l’importance de maintenir des relations étroites et durables avec le Maroc, conformément au principe juridique Pacta sunt servanda (les accords conclus doivent être respectés). Ils ont également souligné les bénéfices mutuels de l’accord annulé.

De son côté, le ministre espagnol des Affaires étrangères, José Manuel Albares, a réagi en affirmant que son gouvernement continuerait à œuvrer avec l’Union européenne et le Maroc pour préserver la solidité des relations bilatérales et les développer davantage.

Une opportunité stratégique pour la Chine
Dans ce contexte tendu, la Chine a rapidement saisi l’opportunité de renforcer sa présence dans les eaux marocaines. Peu après la décision de la Cour de justice de l’Union européenne, Pékin a signé, le 4 juillet, un protocole d’accord avec le Maroc, posant les bases d’une coopération accrue dans le domaine de la pêche. Cette initiative a été suivie par une visite du président chinois Xi Jinping au Maroc, à Casablanca, le 22 novembre 2024, où il a été reçu par le prince héritier Moulay El Hassan renforçant les liens stratégiques entre les deux pays.

Jeune Afrique met en garde contre les répercussions potentielles de ce rapprochement sino-marocain pour l’Europe. La Chine pourrait en effet accroître de manière significative le nombre de ses navires dans les eaux marocaines, ce qui renforcerait sa position économique et géopolitique dans la région, au détriment des intérêts européens.

Une nouvelle dynamique géopolitique
Cette situation reflète les enjeux complexes et les rivalités qui se jouent autour des ressources halieutiques du Maroc, tout en illustrant les conséquences des décisions juridiques européennes sur les relations stratégiques entre l’Union européenne, le Maroc, et d’autres puissances comme la Chine et la Russie. À noter que le Maroc adopte une approche proactive en diversifiant ses partenariats internationaux. Cette stratégie inclut aussi la Russie, qui prépare un nouvel accord de pêche de 4 ans avec le Maroc, après la prorogation de son contrat actuel.




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