vendredi, décembre 13, 2024
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Cannabis marocain : « le top du top », le « caviar du haschich »

Cannabis marocain : « le top du top », le « caviar du haschich »

L’an dernier, François, un jeune Belge de 23 ans, a voyagé au Maroc pour explorer la culture du cannabis dans les montagnes du Rif, une région emblématique de la production de cette plante. Ce périple, qu’il décrit comme motivé par sa curiosité personnelle, lui a permis de découvrir des réalités à la fois fascinantes et complexes, tant sur le plan culturel qu’économique, autour d’une activité formellement interdite par la loi marocaine, mais profondément ancrée dans les traditions locales. Il a témoigné de son expérience auprès du quotidien Belge « La Dernière Heure ».

À noter que ces cultures sont « autorisées » à cause d’une promesse qu’un Sultan du Maroc a donné aux populations qui cultivaient le cannabis depuis plusieurs siècles, après qu’il ait voulu l’interdire, la population locale ne voulaient pas de cette interdiction et ont « négocié » ; les sultans et rois qui se sont succédés ne sont pas revenus sur cette promesse. C’est un peu à l’image des consommateurs de la feuille de coca en Colombie qui sont autorisés à en produire, ce fait étant traditionnel et culturel. Après tout, (le tabac et) l’alcool, qui cause beaucoup plus de ravages (et de violences) est parfaitement légal dans la plupart des pays du monde (essentiellement occidentaux).

Une immersion dans le cœur du Rif
François s’est rendu à Chefchaouen et Ketama, des localités situées dans la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima, connues pour être au cœur de la production de cannabis. Il décrit une région où des centaines, voire des milliers d’hectares de champs de cannabis s’étendent à perte de vue, notamment sur les flancs des montagnes à plus de 2 000 mètres d’altitude. Lors de ses trois séjours dans cette région, il n’a constaté aucune intervention policière dans les zones rurales, bien que des unités de gendarmerie soient visibles sur les axes principaux. Cela l’a amené à supposer l’existence d’accords tacites entre les cultivateurs et les autorités locales, permettant une relative liberté pour les agriculteurs, appelés localement les « jbala ».

La culture et la transformation du cannabis
Le Rif est réputé pour produire des résines de cannabis de qualité exceptionnelle. François mentionne notamment le « frozen » ou « static », un produit premium qualifié de « caviar du haschich ». Au-delà des champs, il a assisté à plusieurs étapes de transformation du cannabis, allant de la récolte à l’emballage. Il a été impressionné par les infrastructures modernes, comme des chambres froides industrielles à -25 °C, qu’il compare à celles utilisées en Europe pour la conservation des viandes. Ces installations, combinées à un savoir-faire local ancestral, permettent une production efficace et qualitative. François souligne que cette activité mobilise une main-d’œuvre importante, faisant vivre des milliers de familles dans cette région isolée.

Un paradoxe légal et culturel
La culture du cannabis est officiellement interdite au Maroc. Pourtant, pour les cultivateurs du Rif, cette plante est cultivée depuis des siècles et fait partie intégrante de leur patrimoine. Ils ne perçoivent pas cette activité comme illégale. François, qui a interagi avec plusieurs familles locales, a été touché par leur hospitalité, tout en remarquant une grande prudence lorsque les conversations touchaient à leurs relations avec les autorités. Cela reflète un équilibre fragile entre tradition, survie économique et cadre légal.

Un enjeu économique et mondial
Selon un rapport des Nations Unies, le Maroc a produit environ 23 000 tonnes de cannabis et 800 tonnes de résine en 2021, ce qui le place parmi les premiers producteurs mondiaux. Cette activité constitue une source de revenus essentielle pour une population estimée entre 140 000 et 400 000 personnes, selon les sources. Malgré les efforts du gouvernement marocain pour diversifier les activités économiques dans cette région, le cannabis reste une culture dominante, surtout face à l’absence d’alternatives viables pour les paysans.

Les motivations de François
François explique que son voyage était motivé par sa consommation personnelle et son envie de comprendre l’origine des produits qu’il utilise. Il précise toutefois qu’il n’encourage pas la consommation de cannabis, soulignant que son expérience était purement éducative. Il garde un souvenir ému de la générosité des habitants du Rif, malgré les défis auxquels ils sont confrontés.

Une perspective plus large
Le voyage de François met en lumière des problématiques complexes liant traditions ancestrales, économie locale, et législation nationale. Alors que le Maroc a légalisé l’usage médical et industriel du cannabis, comme évoqué dans des réformes récentes, le débat reste ouvert sur l’avenir de cette activité dans la région du Rif.