Maroc : les manifestations initiées par le collectif « GenZ 212 »
Maroc : les manifestations initiées par le collectif « GenZ 212 »
Ces derniers jours, plusieurs grandes villes marocaines – notamment Rabat, Casablanca, Tanger, Agadir, Tétouan et Marrakech – ont été le théâtre de manifestations menées par des jeunes répondant à l’appel du collectif « GenZ 212 » (génération Z et numéro de l’indicatif téléphonique du Maroc), un mouvement né de manière spontanée sur les réseaux sociaux dont les fondateurs, anonymes, affirment agir par amour de la patrie et du roi Mohammed 6.
Un mouvement spontané et sans encadrement
Le collectif s’est présenté sur la plateforme Discord comme un « espace de discussion » autour de thématiques telles que la santé, l’éducation et la lutte contre la corruption. Ses initiateurs affirment leur attachement à la patrie et leur engagement pour la non-violence. L’absence de leadership identifié et le caractère spontané de cette mobilisation rendent cependant difficile tout dialogue structuré avec les autorités.
Des revendications sociales fortes
Lors des rassemblements, les jeunes ont scandé le slogan « dignité, justice », exigeant une réforme en profondeur du système éducatif et des services de santé publique. Ils ont également rejeté toute tentative de récupération politique. Ces manifestations interviennent dans un climat tendu, après le décès en août de huit femmes enceintes à l’hôpital public régional d’Agadir à la suite de césariennes (en l’espace d’une semaine). Ce sont ces drames qui ont été les éléments déclencheurs des protestations. Cet événement tragique a conduit au limogeage du directeur de l’établissement et de plusieurs responsables locaux, à l’ouverture d’une enquête et à l’annonce de nouveaux investissements dans le secteur.
Des tensions et des débordements
Si les premiers jours de mobilisation se sont déroulés dans un esprit pacifique, la journée du 30 septembre a marqué un tournant : pour la première fois, des violences et heurts ont été signalés dans plusieurs villes, entraînant des blessés. Ces dérapages ont ébranlé le soutien initial d’une partie de l’opinion publique.
Selon la police, nombre des jeunes interpellés avaient entre 15 et 20 ans. Beaucoup appartiennent à la « Génération Alpha », et non à la Génération Z (personnes nées entre la fin des années 1990 et le début des années 2010) dont le collectif emprunte le nom. D’après le ministère de l’Intérieur, les affrontements ont fait 263 blessés parmi les forces de sécurité et 23 du côté des civils, tandis que 409 personnes ont été interpellées et placées en garde à vue. 142 véhicules des forces de l’ordre et 20 voitures de particuliers ont été incendiés ou endommagés.
La réaction du gouvernement
Réunissant sa majorité et plusieurs membres de son gouvernement, le chef de l’exécutif, Aziz Akhannouch, a tenu à rappeler les réformes déjà engagées dans les secteurs de la santé et de l’éducation. La majorité a assuré « écouter attentivement » les revendications sociales et s’est dite consciente des difficultés structurelles qui affectent le système de santé depuis des décennies. Tout en réaffirmant que le dialogue reste la seule voie possible, elle a souligné que les ambitions exprimées par la jeunesse rejoignent les priorités gouvernementales. Toutefois, elle a insisté sur le fait que l’ampleur de ces réformes ne permet pas d’obtenir des résultats immédiats.
Une mobilisation fragilisée
Les débordements enregistrés – actes de vandalisme et violences isolées – risquent de ternir l’image d’un mouvement jusque-là marqué par son pacifisme. Ils affaiblissent la portée et la légitimité des revendications initiales, centrées sur la justice sociale et l’amélioration des conditions de vie.