dimanche, novembre 16, 2025
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Le Maroc mise sur le renforcement de sa souveraineté hydrique

Une stratégie hydrique ambitieuse pour renforcer la souveraineté en eau face à la crise climatique

Face à l’aggravation de la pénurie d’eau, le Maroc accélère la mise en place d’une stratégie nationale fondée sur le développement d’une industrie du dessalement, la formation de compétences locales et l’innovation technologique. Le ministre de l’Industrie et du Commerce, Ryad Mezzour, détaille une vision structurée visant à atteindre une véritable souveraineté hydrique d’ici 2030, dans un contexte de déficit pluviométrique inédit et de pression climatique croissante.

Un défi hydrique devenu stratégique pour l’avenir du pays

La question de l’eau, longtemps perçue comme un dossier environnemental parmi d’autres, est désormais au cœur des préoccupations nationales. Dans une réponse parlementaire écrite, Ryad Mezzour a rappelé que le Maroc fait face à une situation hydrique « d’une complexité sans précédent », aggravée par la sécheresse durable, l’irrégularité des précipitations et la hausse constante des besoins domestiques, agricoles et industriels.

Selon le ministre, la raréfaction des ressources hydriques de surface, l’épuisement progressif des nappes souterraines et les hausses enregistrées des températures imposent une révision profonde des modèles de gestion de l’eau au Maroc. « La crise hydrique est désormais un enjeu structurel, pas temporaire », insiste-t-il.

Cette crise, qui touche l’ensemble du territoire, impacte directement les secteurs agricoles, urbains et industriels, obligeant l’État à mettre en place une stratégie multi-sectorielle de long terme.

Une vision ancrée dans les orientations royales

Ryad Mezzour souligne que la stratégie nationale de l’eau s’inscrit dans les directives royales appelant à une réponse forte, rapide et fondée sur l’innovation. L’objectif : bâtir une souveraineté hydrique durable, capable de relier technologies, industrie et ressources humaines.

À ce titre, le ministre insiste sur trois priorités majeures :

  • développer une industrie marocaine du dessalement de l’eau de mer,

  • former une nouvelle génération d’ingénieurs et de techniciens spécialisés,

  • favoriser l’émergence d’un écosystème industriel national dédié à l’eau, depuis la conception des stations jusqu’à leur maintenance.

Cette approche, explique Mezzour, doit permettre au Maroc de réduire progressivement sa dépendance envers les technologies importées et de maîtriser toute la chaîne de valeur du dessalement.

Le Maroc renforce sa capacité de dessalement : un secteur stratégique en plein essor

Le Royaume dispose aujourd’hui de 17 stations de dessalement, réparties entre unités industrielles et installations destinées à l’eau potable. Trois d’entre elles — Jorf Lasfar, Safi et Laâyoune — sont dédiées aux besoins industriels. D’autres, comme la station d’Agadir, jouent un rôle hybride en alimentant en eau potable tout en contribuant à l’irrigation agricole.

Mais le pays ne compte pas s’arrêter là. Ryad Mezzour annonce :

  • 4 nouvelles stations en cours de construction,

  • 9 autres programmées,

  • pour atteindre une capacité annuelle de 1,7 milliard de m³ d’eau dessalée d’ici 2030.

Un volume qui permettrait au Maroc de sécuriser durablement ses besoins et d’amortir les effets d’un climat de plus en plus imprévisible.

Le ministre précise que ces projets se font en partenariat avec plusieurs pays disposant de technologies avancées. Mais l’ambition finale reste inchangée : « évoluer vers une industrie 100% nationale du dessalement ».

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Vers une filière industrielle marocaine dédiée à l’eau

Parallèlement aux projets de dessalement, le ministère travaille sur la création d’un cluster national de l’eau, destiné à structurer une véritable filière industrielle. Ce pôle aura pour vocation de :

  • promouvoir l’innovation et la recherche appliquée,

  • favoriser la fabrication locale d’équipements essentiels (membranes, pompes, systèmes de filtration…),

  • moderniser les processus industriels liés au secteur hydrique,

  • attirer des investissements dans les technologies de l’eau,

  • développer la collaboration entre entreprises, start-up, universités, centres techniques et opérateurs publics.

Le Fonds de Soutien à l’Innovation (FSI) est déjà mobilisé pour financer les projets porteurs dans le domaine, notamment ceux intégrant des technologies de pointe ou réduisant les coûts énergétiques du dessalement.

Former les compétences marocaines pour assurer la souveraineté hydrique

Au-delà des infrastructures, le ministre insiste sur un point souvent sous-estimé : la formation. La transition hydrique du Maroc nécessitera des milliers de techniciens qualifiés, de chercheurs, d’ingénieurs et de spécialistes du traitement de l’eau.

Des programmes de formation professionnelle, universitaire et technique sont en cours de structuration pour accompagner cette transformation. L’objectif est double :

  • disposer d’une main-d’œuvre qualifiée pour concevoir, construire et entretenir les stations,

  • réduire la dépendance envers les compétences étrangères dans les domaines technologiques sensibles.

Innovation et transfert technologique : moteurs de la transition hydrique

La souveraineté hydrique passe aussi par la maîtrise des technologies, notamment dans un secteur où les procédés évoluent rapidement. Mezzour rappelle que la transition vers une industrie nationale du dessalement repose sur :

  • le transfert de technologies avancées vers les entreprises marocaines,

  • le développement de solutions locales (prétraitement, membranes, optimisation énergétique…),

  • la recherche appliquée en partenariat avec les universités et centres de recherche,

  • l’adoption de procédés moins énergivores et plus durables.

L’objectif est clair : faire du Maroc un pôle régional d’expertise et d’innovation dans les solutions hydriques.

Un engagement national pour protéger l’avenir hydrique du Maroc

Ryad Mezzour réaffirme l’engagement de son ministère à travailler en coordination avec l’ensemble des acteurs — collectivités, opérateurs économiques, établissements publics, start-up et partenaires internationaux — pour accélérer la transition hydrique.

Selon lui, la souveraineté hydrique n’est pas seulement un objectif technique : c’est une condition indispensable au développement économique, à la stabilité sociale et à la résilience du pays face au changement climatique.